Le conseil régional Auvergne-Rhône-Alpes était réuni en assemblée plénière, les 14 et 15 décembre 2023 pour étudier une série de rapports régionaux importants : plan régional Mobilités 2035, convention TER, budget primitif pour 2024, plan handicap, etc.
L’assemblée plénière, c’est quoi ?
C’est le temps fort de la vie démocratique du conseil régional : les 204 membres du conseil régional, qui représentent les citoyennes et citoyens d’Auvergne-Rhône-Alpes, se réunissent environ tous les deux mois dans l’hémicycle à Lyon pour la session plénière.
Comme à l’Assemblée nationale, les 204 membres du conseil régional ont le pouvoir de délibérer c’est-à-dire de voter les délibérations (les décisions) que la Région mettra en œuvre. Celles-ci sont proposées par l’exécutif : ici Laurent Wauquiez et ses vice-président·es.
Pendant un jour et demi, les groupes politiques de la majorité et de l’opposition défendent, amendent et critiquent les délibérations, expliquent pourquoi elles doivent être soutenues ou rejetées. Chaque délibération est ensuite votée et les services du conseil régional peuvent ensuite les appliquer.
La session plénière est retransmise en vidéo sur le site de la Région.
Budget primitif 2024 : la région la plus autosatisfaite de France
Chaque année, nous avons l’impression que nous ne vivons pas dans le même monde que Laurent Wauquiez, pas dans le même siècle, le 21e, celui qui va nous amener à relever le plus grand défi que l’humanité ait eu à porter, celui qui va nous amener très vite à transformer nos vies, nos modes de production, nos modes de consommation.
C’est pourtant une politique d’austérité digne des années thatchériennes que Laurent Wauquiez nous impose depuis 2016. Ce budget est celui de tous les paradoxes, des promesses non tenues, des fanfaronnades sans moyens.
La COP 28 vient de se terminer en demi-teinte, pour une sortie timide des énergies fossiles. En Auvergne-Rhône-Alpes, où en sommes-nous ? Inutile de participer dans les prochains jours à la COP territoriale. Ce budget parle de lui-même : -19% en moins pour la politique de l’énergie, juste 6,2 M€ pour produire plus d’énergies renouvelables. Nous n’avons à ce train aucune chance de nous inscrire dans la trajectoire de neutralité carbone.
Ils seront nombreux les clients qui se satisferont de ce budget. Mais nous serons redevables vis-à-vis de l’Histoire. La Région n’aura cessé dans ce mandat de financer des activités fossiles et consuméristes, de mettre en avant les valeurs de compétition, de entretenir l’effet d’aubaine plutôt que l’effet de levier pour accélérer la transition de notre économie.
Tout au long de ce mandat, vous pourrez compter sur notre détermination pour préserver le vivant, restaurer confiance et transparence dans la vie politique et porter des valeurs de coopération pour construire pas à pas une Région plus juste, plus égalitaire, plus solidaire et plus écologique.
C’est pourquoi, sans surprise, nous avons voté contre ce budget à l’occasion duquel nous avons déposé 49 amendements.
Retrouvez l’intervention de Fabienne Grébert :
Retrouvez notre article détaillé sur le budget et les amendements déposés :
Transports : comment rattraper huit ans de sous-investissement ?
Stratégie Mobilités 2035
La feuille de route des mobilités 2035 donne des perspectives à 12 ans, ce qui, en matière de transport, permet de s’attacher aux changements structurels nécessaires pour relever le défi d’une diminution de l’impact carbone.
Le CPER Mobilités qui, il y a quelques mois encore, semblait donner le la de la feuille de route 2035 disparaît de tout engagement réciproque entre l’Etat et la Région, actant un peu plus encore l’affaiblissement d’un partenariat essentiel en matière d’infrastructures pour un projet partagé d’aménagement territorial. Au contraire, l’exécutif joue le rapport de force.
La feuille de route pose également la simplification de l’achat de titres de transport à travers une nouvelle application Oùra qui permettra peut-être enfin d’atteindre le niveau de services proposés par la Métropole de Lyon et d’avancer vers une offre harmonisée. Cependant, aucun chantier réel sur la tarification ne s’annonce pour encourager et faciliter l’utilisation des transports en commun dans la région.
L’exécutif promet 10 000 places de consignes à vélo sécurisées dans les gares, à horizon 2035 et sans phasage, pour encourager l’intermodalité, préparant ainsi une interdiction future des vélos dans les trains du quotidien.
Surtout, elle engage un grand plan dit de décarbonation des transports individuels routiers. Loin d’accompagner celles et ceux qui ne pourraient se passer de véhicules en particulier en zones peu denses, l’exécutif lance surtout un grand plan de re-bitumisation des routes.
Nous avons déposé 11 amendements sur ce rapport : une priorité donnée aux transports en commun, +100% d’offre TER d’ici 2035, la mise en place des SERM (services express régionaux métropolitains) dans notre région d’ici 2028, une hausse de l’investissement pour les rames afin d’accompagner le déploiement des SERM, 2,7 milliards d’euros sans intégrer les péages et redevances, le maintien et la réouverture d’ici 2035 de dessertes fines du territoire, la réouverture du tronçon Thiers-Boën, la mise en accessibilité des 82 gares prioritaires du réseau TER (pour 47 accessibles actuellement), l’accélération des aménagements cyclables aux abords des gares, un moratoire sur la construction de nouvelles infrastructures routières et la création d’un comité stratégique régional des mobilités afin de réunir l’ensemble des parties prenantes pour assurer le suivi du plan.
Un seul de nos amendements a été retenu, une fois sous-amendé, concernant la mise en accessibilité des gares, mais en renvoyant la responsabilité à Gares & Connexions…
Convention TER SNCF
Attendue depuis plus d’un an, la dernière convention passée de gré à gré entre la Région et SNCF Voyageurs va organiser le service de TER sur les 10 prochaines années tout autant que préparer le découpage du service public ferroviaire dans le cadre de l’ouverture à la concurrence.
Négociée sur fond de litiges financiers, cette convention d’un montant de 590 millions pour l’exploitation du service, a peiné à aboutir et fait donc suite à une année de contrat unilatéral imposé par la Région. Le règlement in extremis des litiges, pour la période COVID et pour les moyens insuffisants imposés par la Région pour le service 2023, a permis de présenter cette convention en assemblée plénière ce qui était largement attendu par notre groupe.
Si les indicateurs de qualité de service évoluent, avec notamment le suivi de l’emport – le nombre de places réelles par rapport au nombre de voyageurs attendus – en complément de la ponctualité (à 6 min) et la réalisation de l’offre, un trop grand nombre de données, notamment financières, sont sorties des annexes, soumises au secret des affaires.
Ceci constitue un risque de non-transparence questionnable sur les moyens financiers mis dans la réalisation du service public ferroviaire.
Cette convention négociée sous haute pression est indispensable à la réalisation du service ferroviaire et à son amélioration. En raison de sa nature, mais aussi pour dénoncer le simulacre démocratique de cette convention présentée en fin d’échéance, nous nous abstiendrons de tout amendement.
Retrouvez l’intervention de Cécile Michel sur ces deux rapports :
Handicap : Une délibération intéressante mais un budget dérisoire
Le Plan « Une Région pionnière qui innove et agit pour tous les handicaps » s’apparente plus à un recensement des différentes actions du conseil régional dans le champ du handicap depuis 2017 plutôt qu’un véritable plan.
Nous reconnaissons le caractère volontariste et globalement positif de cette politique régionale. Nous saluons également la vice-présidente Sandrine CHAIX, rare membre de l’exécutif ouverte à la discussion mais nous regrettons le faible budget alloué à cette thématique : 5M€ / an directement, 31M € sur 6 ans sur les politiques transversales.
Nous regrettons également le manque d’ambition sur certaines compétences majeures du conseil régional, comme par exemple la faible accessibilité des gares TER (47 gares accessibles sur 82 classées prioritaires) ou encore la faible sensibilisation des lycéens au handicap. Que dire enfin du deux poids deux mesures opéré entre les minibus sportifs et les véhicules adaptés ?
Le texte proposé par l’exécutif régional va cependant dans le bon sens, nous le voterons donc sans hésitation, tout en portant des amendements pour tenter d’en réhausser l’ambition.
Notre groupe a déposé 9 amendements sur ce rapport : charte H+ pour tous les instituts de formation, accessibilité des gares TER prioritaires, malus progressif sur les subventions régionales aux entreprises ne respectant pas les 6% de travailleurs handicapés dans leurs effectifs, mise en place d’une tarification fortement réduite pour les personnes en situation de handicap dans les sites en maîtrise d’ouvrage de la Région, aide à l’investissement à destination des collectivités locales et des associations pour la mise en accessibilité des établissements recevant du public (ERP), qui ne peuvent bénéficier du fonds territorial d’accessibilité mis en place par l’Etat, élargir la mise à disposition gracieuse de minibus pour les associations œuvrant dans le champ du handicap, création de maisons de répit, associer les personnes en situation de handicap à la construction des politiques qui les concernent, mise en place d’une action de sensibilisation aux handicaps en contrepartie des subventions régionales.
Un seul a été accepté, mais pas le moindre : le soutien aux aidants, grands oubliés bénévoles, pour lequel la Région adhère à l’idée de financer des maisons de répit, lieux de soutien et d’écoute.
Retrouvez l’intervention de Maxime Meyer :
Santé : Renforcer l’accès aux médicaments en milieu rural : soutien aux officines de proximité
Dans ce rapport, la Région prévoit la mise en place d’un plan d’action en faveur des officines de pharmacie dans les territoires ruraux d’Auvergne-Rhône-Alpes.
Parmi les différentes mesures prévues, ce plan passera par l’intégration des pharmaciens et pharmaciennes à la campagne régionale de sensibilisation à la vaccination contre les papillomavirus humains (HPV).
L’exécutif crée également une aide à l’investissement de 30 000 € maximum (et 50% du budget total maximum) pour moderniser les officines dans les zones rurales : aide à l’aménagement des locaux (donc sécurisation), aide à l’installation d’équipements dédiés à la télémédecine assistée, aide à l’acquisition de véhicules pour faciliter l’exercice (livraison de médicaments, vaccination).
La Région compte également engager dès le premier semestre 2024 une campagne de promotion des métiers de la pharmacie.
Si les mesures annoncées par ce plan vont dans le bon sens, il s’avère que les manques en termes de santé dans les territoires ruraux ne s’arrêtent pas aux pharmacies mais concernent plus globalement la présence de métiers du soin. Notre amendement, pour élargir cette campagne de promotion aux autres métiers du soin également en forte pénurie, a été accepté !
Notre groupe a déposé un second amendement sur ce rapport : nous avons proposé que l’aide régionale puisse intégrer le soutien aux travaux d’accessibilité.
Retrouvez l’intervention de Benjamin Joyeux :
Finances :
Gestion du personnel
Enfin ! L’exécutif prévoit enfin pour mars 2024 le versement d’une prime “pouvoir d’achat” pour l’ensemble des agents de notre collectivité, avec un barème de 50 à 500 € selon le niveau de revenus de l’agent. En commission permanente, nous venons de nous prononcer également sur l’abondement de la Région au CPF (compte personnel de formation) des catégories C pour favoriser leur accès à la formation. Ce sont de bonnes nouvelles, même si elles arrivent tardivement !
La situation des stagiaires, des salariés en Parcours emploi compétences (PEC : contrats aidés) et des apprentis est également améliorée avec des avantages sur l’accès à la restauration et un effort de rémunération. Par ailleurs, la collectivité fait sa part sur l’intégration des travailleurs handicapés à hauteur de 10,14% des effectifs.
À l’occasion de cette plénière, nous est également présenté le rapport social unique (l’équivalent du bilan social pour le secteur privé). Nous y retrouvons les mêmes indicateurs qui montre qu’il reste du chemin à faire sur l’égalité homme/femme : écart de salaire entre homme et femme encore de 300 euros pour les catégories A, écrasante majorité de femmes à temps partiel (85%), et notamment dans les personnels de lycée en catégorie C.
Concernant les personnels des lycées encore, 53% des effectifs ont entre 50 et 59 ans. Ce vieillissement qui n’a pas été anticipé, mais également le turn over (20%) sont de bons prétextes pour légitimer et engager l’externalisation des services de restauration et d’entretien. C’est également l’occasion d’externaliser la sinistralité : on peut lire dans le rapport que le taux de fréquence des accidents du travail des agents des lycées s’élève à 40,1, soit un taux 8 fois supérieur à celui calculé sur les autres agents de notre collectivité !
Notre groupe a déposé un amendement sur ce rapport : nous proposons que la majoration de la participation de l’employeur soit prévue pour la garantie prévoyance pour les plus de 900 agents bénéficiaires de l’obligation d’emploi concerne aussi la complémentaire santé.
Travailleurs handicapés : le rapport prévoit une refonte du dispositif de protection sociale complémentaire pour l’améliorer et l’harmoniser d’ici le 1er janvier 2025. Une majoration (10,14% des 9000 agents du conseil régional).
Retrouvez l’intervention de Véronique Vermorel :
Indemnités des membres du CESER
Les 190 membres du CESER représentent les diversités de la société civile organisée dans l’ensemble des territoires de notre grande région. La qualité de leurs avis montre leur grande connaissance des enjeux de la région et devraient être plus souvent suivies. De la même manière, le fait que les avis soient majoritairement votés à l’unanimité de leurs membres montrent que leurs préconisations sont consensuelles et apartisanes, elles sont seulement portées par l’intérêt général des habitants de notre région.
Notre groupe regrette donc que ces contributions ne soient pas utilisées par notre assemblée, elles pourraient au moins être débattues en commission thématique. Cela témoignerait de l’intérêt que porte notre assemblée délibérante à cette assemblée consultative.
Retrouvez l’intervention de Vincent Gay :
Rapport CRC – Transports dans l’agglomération genevoise
Les transports dans ce secteur ont fait l’objet d’une coopération entre les différentes collectivités françaises et suisses autour du projet du Léman Express, projet soutenu par la Région Auvergne-Rhône-Alpes, permettant une augmentation de l’usage du train dans ce secteur.
La chambre régionale des comptes (CRC) émet deux recommandations. En premier lieu, elle demande à la Région de définir sans délai les bassins de mobilité (suivant le SRADDET, ils auraient dû être définis avant fin mars 2023). Cela permettra ensuite de définir et mettre en place les contrats opérationnels de mobilité sur chacun de ces bassins, en concertation avec les collectivités locales.
En second lieu, la CRC demande que les enquêtes réalisées par la Région et la SNCF auprès des usagers des gares du Léman Express soient transmises aux différentes autorités organisatrices de mobilités (AOM). En effet, ces enquêtes couvrent de nombreux sujets : accès à la gare, stationnement voiture et vélos, accès transport en commun, accessibilité de la gare et quai, origine géographique et moyens de transport des utilisateurs.
Ce rapport a été l’occasion pour nous de rappeler notre attachement à une approche coordonnée et globale sur les mobilités, avec notamment une politique cohérente des rabattements sur les gares, privilégiant les modes doux et en concertation avec l’ensemble des acteurs, les usagers et les différentes entités organisatrices de mobilités.
Retrouvez l’intervention de Vincent Gay :
Voeu : Hébergement d’urgence
Dans la lignée des mobilisations engagées par les collectivités et des parlementaires, dont la députée écologiste du Rhône Marie-Charlotte Garin, pour la mise à l’abri en faveur des mineurs dormant dans la rue, nous proposons un vœu lors de cette assemblée plénière. Nous demandons à l’Etat deux choses :
- de répondre de manière effective à son obligation légale de mise à l’abri inconditionnelle des personnes sans abri et en premier lieu des enfants ;
- de doter les collectivités locales de moyens suffisants pour qu’elles puissent assurer leurs compétences en matière de protection de l’enfance.
Ce vœu fait écho à notre amendement budgétaire pour le soutien aux communes et associations qui pallient les défaillances de l’État en matière d’accueil des personnes en situation de vulnérabilité. La Région doit aussi faire sa part.
Enfin, à l’heure où le projet Asile & immigration remet en question cette inconditionnalité de la mise à l’abri, notre vœu est également un rappel des valeurs fondamentales de notre République où la liberté n’est rien sans l’égalité et la fraternité.
Retrouvez l’intervention de Myriam Laïdouni :
Question orale : quelle prise en compte de la mission Lycées ?
Avec ses 5716 réponses au questionnaire, la Mission Lycées a été un franc succès. Cette forte mobilisation des usagères et usagers des lycées de la région pour informer sur l’état du bâti de leur établissement démontre un intérêt des jeunes pour la chose publique.
Le conseil régional aurait tout intérêt à se saisir de cette main tendue et prendre en compte les 30 recommandations issues des 189 pages du rapport de la Mission Lycées afin qu’il n’y ait, réellement, plus aucun lycée en mauvais état en Auvergne-Rhône-Alpes. Notre question a donc été la suivante : est-ce que Laurent Wauquiez prévoit de prendre en compte les recommandations issues des 5 716 réponses des usagers des lycées publics de la région à l’enquête citoyenne Mission Lycées ?
Retrouvez la question orale de David Buisson :