Réouverture des lignes de proximité : notre combat pour la réhabilitation du TER entre Thiers et Boën

Réouverture des lignes de proximité : notre combat pour la réhabilitation du TER entre Thiers et Boën

À l’été 2016, le tronçon Thiers-Montbrison qui se situe sur la ligne ferroviaire reliant Clermont-Ferrand à Saint-Etienne a été définitivement fermé à la circulation. Le motif invoqué était la dilatation des rails dans l’été ainsi qu’un mauvais état de la ligne, un manque d’entretien, un service trop faible et trop dégradé. En effet, il n’existait plus que trois allers-retours par jour et le temps de trajet avait augmenté de 25% entre 1990 et 2015. 

Le bus a alors été présenté comme une alternative. Un car passant par l’autoroute reliait directement Saint-Etienne et Clermont-Ferrand et un bus remplaçait le train sur le tronçon Thiers-Montbrison. Cependant la fréquence et les horaires de bus étaient inadaptés aux trajets quotidiens et insuffisants pour offrir une vraie alternative à la voiture.

Organisation actuelle de la desserte sur la ligne Clermont-Ferrand – Saint-Étienne. Réalisation Cerema Centre-Est

En 2019, la majorité régionale a finalement proposé la réouverture du tronçon Boën-Montbrison en direction de Saint-Etienne et par la même occasion enterré le projet de réouverture de la ligne Boën-Thiers. Un plan de 8,3 millions d’euros a alors été lancé mais ce sont les petites intercommunalités qui l’ont financé pour moitié.

Cette réouverture du tronçon Boën-Montbrison demeure insuffisante. Il compte seulement 5 allers-retours par jour et sans cohérence avec des horaires de travail. La qualité du service n’est donc pas au rendez-vous alors même que la ligne a un potentiel d’utilisateurs qui se situe entre 7 000 et 10 000 voyageurs par jour si l’on se base sur la fréquentation des années 1990.

Après avoir trop longtemps refusé d’investir dans la rénovation et l’entretien de cette ligne, la Région acte en février 2021 le financement d’une étude portant sur le potentiel réel de fréquentation de la ligne et des autres modes de transport, ainsi que sur l’actualisation du coût de régénération de l’infrastructure ferroviaire. Or, le centre d’études et d’expertise sur les risques, l’environnement, la mobilité et l’aménagement (Cerema) chiffre finalement les travaux à 115 millions d’euros alors qu’ils étaient évalués à 50 millions d’euros  en 2016. L’inaction de la Région aura donc coûté 65 millions d’euros aux contribuables. A cela s’ajoute le fait que la Région Auvergne-Rhône-Alpes soit l’une des rares à ne pas avoir engagé et signé un « Protocole d’accord Etat – Région relatifs à l’avenir des petites lignes ferroviaires ».

De fait, l’Etat est également responsable de cette situation. En effet, dans la mesure où il est propriétaire du réseau ferré national, l’entretien des voies de chemin de fer relève directement de sa compétence. Ainsi, il aurait dû financer suffisamment SNCF Réseau, chargé de réaliser les travaux sur ces lignes. En mars 2023, Élisabeth Borne annonçait un « plan d’avenir pour les transports» de 100 milliards d’euros mais nous regrettons qu’il n’ait jamais été mis en place. 

Les enjeux autour de la réouverture de cette ligne de desserte fine sont multiples. L’objectif est tout d’abord de faciliter la mobilité des 860 500 personnes qui habitent le long de la ligne, dans des territoires ruraux et montagneux. La ligne permettrait notamment de relier deux agglomérations majeures de la région que sont Clermont-Ferrand et Saint-Etienne et de réduire ainsi la fracture entre les territoires d’Auvergne et ceux de Rhône-Alpes. De plus, la liaison entre Clermont-Ferrand et Saint-Etienne raccourcit également celle entre Clermont-Ferrand et Lyon. 

Face à ces enjeux, le principal argument avancé par l’exécutif est d’affirmer que la ligne n’est pas rentable. Or, aucune ligne TER n’est financièrement rentable. La billettique ne finance en moyenne qu’entre 20 et 35% des coûts des trajets. Ce que la majorité oublie également c’est qu’une route ne l’est d’ailleurs jamais non plus et qu’à l’inverse du train, plus on l’utilise, plus elle coûte cher d’un point de vue social, financier et environnemental. Enfin, la finalité d’un service public régional est-elle d’être rentable, ou d’apporter des solutions quotidiennes et indispensables aux habitant.es d’Auvergne-Rhône-Alpes ?

Par ailleurs, lorsqu’il s’agissait de financer la bétonisation des sols et les infrastructures routières, Saint Etienne Métropole, le Département de la Loire et la Région étaient prêts à débourser 131 millions d’euros chacun pour financer l’A45 entre Lyon et Saint Etienne. La Région a également su trouver 230 millions d’euros pour financer la RN88, soit deux fois plus que ce qui est nécessaire pour rouvrir les 48 km fermés entre Boën et Thiers, alors que le TER relève directement des compétences régionales. Cette réouverture offrirait une véritable alternative aux 18 000 véhicules qui empruntent quotidiennement l’A89 entre Thiers et Noirétable mais elle permettrait également d’écarter la menace de fermeture des 145 km de ligne restants (Saint-Etienne – Boën et Thiers – Clermont-Ferrand) puisque ces tronçons perdent beaucoup de sens s’ils ne sont plus intégrés à un réseau structurant.

Enfin, la nécessité de rouvrir cette ligne se justifie avant tout par des raisons sociales et écologiques. En effet, alors qu’un trajet entre Saint-Etienne et Clermont-Ferrand coûte en moyenne 45€ en voiture, il ne coûte que 25€ en train, et d’un point de vue environnemental, alors que ce trajet émet plus de 30 kg de CO² en voiture, cette pollution est réduite à 800 g en train. 

Notre objectif commun est donc la réouverture de la ligne rénovée, pour retrouver des temps de trajets compétitifs et une fréquence qui permette d’offrir une vraie alternative à la voiture en répondant aux besoins en terme de mobilité domicile-travail.

Pour y parvenir, nous proposons un plan régional d’investissements massifs dans le réseau ferroviaire et le matériel roulant pour rétablir la desserte fine, améliorer les temps de trajets et la fréquence des trains. L’objectif est de proposer plus d’offres et une meilleure qualité de service pour inciter à prendre le train. Nous demandons pour cela la fin des grands travaux dans le réseau routier et la baisse des tarifs TER pour renforcer l’attractivité mais aussi la réouverture des gares, notamment en amenant d’autres services dans la gare ou à proximité comme des commerces, des espaces de télétravail, des garderies ou encore des crèches.

Nous avons envoyé plusieurs demandes allant dans ce sens au Président de Région Laurent Wauquiez,  elles sont toujours restées sans réponse. Nous avons rédigés de nombreux communiqués de presse à ce sujet afin de porter notre combat dans la sphère médiatique et plusieurs conseillers régionaux de notre groupe comme Anne Babian-Lhermet, Catherine Bony ou Olivier Longeon, ont participé à des mobilisations en janvier 2021 et en mars 2022 réunissant plusieurs centaines de personnes autour du collectif  de défense pour la réouverture de la ligne Boën-Thiers « Le Train 634269 », de plusieurs acteurs syndicaux et d’autres élus locaux. Parallèlement, en décembre 2021 nous avons proposé un amendement pour augmenter le financement des régénérations des lignes TER et en décembre 2023, nous avons plus spécifiquement proposé un amendement pour la réouverture du tronçon Thiers – Boën-sur-Lignon sans succès. 

La réouverture des lignes du quotidien et le maintien de la desserte fine sont nécessaires pour garantir l’égalité territoriale et encourager les mobilités bas carbone. Ce combat est primordial et nous continuerons de le mener ! 

3 réflexions sur “Réouverture des lignes de proximité : notre combat pour la réhabilitation du TER entre Thiers et Boën”

  1. Xavier Braud.

    Excellent article, rigoureux et bien documenté. C’est si rare de lire cette évidence : aucune route n’est rentable.

    1. Ce n’est ni le gouvernement, ni la région qui est responsable, mais simplement l’absence de voyageurs dans les trains. Le taux de remplissage a toujours été faible..
      Et quand la ligne a fermé, peu de monde s’est indigné. Maintenant, mettre 110 millions d’euros pour régénérer 50 kms de ligne me semble totalement à l’ouest.. par contre, se battre pour avoir des bus aux bonnes heures, électriques et qui passent par les centres ville, pourquoi pas..

  2. 7000 à 10000 voyageurs/jours? Vraiment n’importe quoi ! Dans les années 90, à part les vendredis soir et lundi matin, les autorails étaient bien souvent vides. Pourtant, le potentiel habitants/voyageurs était déjà important, la vitesse non limitée et les horaires plutôt bien placé.. Plutôt que se battre pour une hypothétique réouverture, plutôt que dépenser de l’argent public pour des études qui finiront toujours par vous dire ce qu vous voulez entendre, tout en vous donnant un chiffrage travaux hallucinant (on parle de 140 à 160 millions nécessaires), battons nous pour sauver et moderniser des lignes toujours ouvertes, mais en grand danger! Thiers/Boen, c’est mort.. il fallait se bouger le popotin quand les trains roulaient encore!!

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