Manger local et paysan, oui ! Valoriser l’agro-industrie, non !

« Ma région, ses terroirs » est une marque créée par la Région Auvergne-Rhône-Alpes et les représentants du monde agricole et agroalimentaire. La Région, à travers cette marque, valorise aujourd’hui des entreprises allant à l’encontre du bien-être animal et du bien-être des éleveurs et des éleveuses d’Auvergne-Rhône-Alpes. Dommage de mettre autant de moyens financiers dans un processus non abouti sans critères sociaux et environnementaux. Aujourd’hui, ces lacunes éclaboussent l’ensemble des porteurs de la marque. Pour les Écologistes, ce n’est pas faute d’avoir prévenu !

En préambule, nous tenons à réaffirmer ici tout notre soutien aux éleveuses et éleveurs régionaux qui produisent et proposent des produits, fermiers, paysans, artisanaux, biologiques… Ces acteurs proposent de vrais produits de qualité, contrairement à ceux proposés par le complexe agro-industriel, qui a une forte responsabilité sur les nuisances sociales, environnementales et sanitaires : ethnocide paysan, chômage, pollutions, malbouffe, maladies cardiovasculaires, surpoids voire obésité, diabète, hypertension artérielle, cancer… Notre société doit faire face aux conséquences et paie aujourd’hui tous les surcoûts de santé qui vont avec ces nuisances!

Nous souhaitons également ici exprimer l’importance de relocaliser notre alimentation pour répondre aux enjeux de transport, de climat et d’emplois. Mais ce qu’il faut dire clairement, c’est que nous avons besoin pour cela de paysannes et de paysans nombreux pour faire vivre nos territoires et pas de fermes usines ultramodernes avec si peu d’effectifs salariés et une mécanisation à outrance qui endette les exploitants avec des investissements qui les poussent à la surproduction. Nous ne pouvons que regretter quand l’agriculture devient simplement productrice de matières premières, objet de compétition et de spéculation engendrant une industrialisation qui la coupe de sa finalité alimentaire.

Extraction du site internet « Ma région, ses terroirs »

Quand une bonne idée à la base valorise finalement n’importe quelles dérives

La démarche de « Ma région, ses terroirs » est simple, voire simpliste, « c’est avoir la garantie de la provenance régionale de ce que l’on achète : une production issue d’Auvergne-Rhône-Alpes, cultivée, élevée et transformée par des acteurs régionaux ».

Jusque-là tout va bien : 100% Auvergne-Rhône-Alpes pour les produits non transformés, et au moins 80 % de la matière première issue de la région Auvergne Rhône-Alpes pour les produits transformés.  

Mais quand la marque annonce « dans le respect des bonnes pratiques agricoles », ou que des membres de l’exécutif et des communicants parlent de « Produits de qualité » ou de « Label de qualité », là nous pouvons sincèrement en douter, car il n’y a aucun référentiel, aucune charte traitant ces sujets, et malheureusement la subjectivité est de mise.

Extraction du site internet « Ma région, ses terroirs »

À la base, un objectif fort : créer du lien entre agriculteurs et consommateurs de notre belle région, mais comment préserver ce lien de confiance sur une marque si aucun garde-fou n’existe quant à la vraie qualité du produit. Et parmi les 4 500 produits déjà agréés, les 500 entreprises engagées, il y a des bons produits, des produits artisanaux, des produits paysans, des produits bios… mais aux côtés d’entreprises agro-alimentaires moins scrupuleuses, ce qui discrimine l’ensemble des produits de la marque.

C’est en décembre 2021 que le nouveau règlement d’usage de la marque « Ma région, ses terroirs » a été approuvé en commission permanente et c’est lors de cette même commission que l’entreprise LDC Bourgogne a bénéficié du renouvellement de son agrément pour 3 ans. Nous rappelons ici que le volailler LDC Bourgogne, inconnu par la plupart de nos concitoyens, possède des marques, elles, bien connues : Le Gaulois, Loué, Marie, Maître Coq, Les fermiers de l’Ardèche… Dans ces 2 cas, c’était sans le vote des Écologistes qui s’opposent à cet enfumage tant qu’un minimum de critères, autres que la localisation, ne permet pas l’éclairage des choix des consommateurs et consommatrices.

Tableau de la liste des produits bénéficiant du renouvellement de son agrément pour 3 ans, dont LDC Bourgogne

Aujourd’hui 88% des Françaises et des Français sont opposés à l’élevage intensif. L’attente sociétale est là, mais qu’en fait le secteur de l’agroalimentaire et qu’en fait la Région Auvergne-Rhône-Alpes ? 

Il reste encore beaucoup à faire. Nous, Écologistes, continuons à alerter sur la réalité des conditions d’élevage et d’abattage des animaux, mais aussi sur les conditions de vie des agriculteurs et agricultrices de notre région.

Extraction du site internet « Ma région, ses terroirs »

Sur 800 millions de poulets abattus chaque année en France, 83 % sont élevés de manière intensive. Le groupe LDC est le premier producteur de volailles français, il a donc une responsabilité́ majeure dans l’évolution des conditions d’élevage et d’abattage des poulets.

Des marques de LDC, extrait de leur site internet

Mal-être et OGM à tous les étages !

Quand la marque Le Gaulois prétend « s’adapte[r] aux spécificités de chaque espèce », « préserv[er] le bien-être animal, la santé des volailles et l’environnement » et garantir une alimentation sans OGM pour sa démarche « Oui, c’est bon ! », elle ment. En effet, des images dans un élevage Le Gaulois « Oui, c’est bon ! » montrent des conditions de vie sordides pour les poulets : 

  • les animaux sont entassés à un niveau de densité supérieur à 30 kg/m2, une limite au-delà de laquelle les études scientifiques indiquent que la densité conduit systématiquement à des problèmes graves de bien-être pour les poulets (exemple : rapport du Comité scientifique de la Commission européenne). Les poulets vivent un enfer : entassés jusqu’à 20/m², souvent privés d’accès à l’extérieur, sans aucun moyen de se percher ou de picorer ;
  • les poulets sont issus d’une race à croissance ultrarapide, appelée Ross 308. Cette race a été créée par une sélection génétique intensive pour que les oiseaux grossissent le plus vite possible, souvent en 38 jours. Cette croissance ultrarapide des muscles est la cause d’importants problèmes de santé pour les poulets : leur squelette n’arrive plus à supporter le poids de leur corps et leurs organes vitaux sont comprimés, entraînant des difficultés cardiaques et respiratoires. 
  • enfin, après 35 jours ou à peine plus, ils sont envoyés à l’abattoir où ils sont violemment accrochés par les pattes, la tête en bas, alors qu’ils sont encore conscients.

Ces pratiques sont incompatibles avec le bien-être des animaux, contrairement à ce que prétend Le Gaulois.
Le groupe LDC, auquel la marque appartient, refuse d’ailleurs de s’engager sur les critères du European Chicken Commitment. Races de poulets à croissance moins rapide, lumière naturelle et intensité lumineuse minimale, baisse des densités dans les élevages, enrichissement du milieu de vie, abandon de l’accrochage des poulets encore conscients à l’abattoir : les mesures de cette demande, portée par une trentaine d’associations en Europe, sont pourtant un strict minimum. 

Selon L214 et leur enquête, des documents présents dans un élevage indiquent que le soja OGM est le composant majeur dans l’alimentation des poulets, alors même que Le Gaulois promet une alimentation sans OGM en ce qui concerne la démarche « Oui, c’est bon ! ». Cette promesse est d’ailleurs particulièrement mise en avant sur les packagings des produits « Oui, c’est bon ! ».

Extraction du site internet « Ma région, ses terroirs »

Ses pratiques cruelles d’élevage et d’abattage sont aujourd’hui dénoncées par L214, 2 vidéos, une courte : https://www.l214.com/stop-cruaute/ldc/?utm_medium=email… et une longue : https://www.youtube.com/watch?v=Wf2Kq1MkhXE . Pour tenter de mettre fin aux pires pratiques d’élevage et d’abattage des poulets, une pétition 👉https://www.l214.com/stop-cruaute/ldc/?utm_medium=email…

Et les éleveurs et éleveuses dans tout ça ?

Au sein de ce groupe, ils et elles sont souvent en intégration : c’est-à-dire en contrat établi entre un éleveur et un intégrateur, celui-ci étant une entreprise industrielle ou commerciale. L’intégrateur fournit à l’éleveur certains moyens de production, qui sont dans la plupart des cas, l’alimentation et les poussins. L’éleveur, quant à lui, est souvent propriétaire des bâtiments. Les intégrateurs de volailles de chair reprennent en général les animaux une fois qu’ils sont prêts pour l’abattage.

Facteurs limitants pour les agriculteurs et agricultrices :

• Dépendance financière au groupe,
• Limite ou absence de choix dans la planification temporelle (remplir ses bandes, date/heure de livraison et d’enlèvement),
• Technique de production homogénéisée (imposée) : produits vétérinaires, souche, bâtiment, intrants,
• Liaison à des fournisseurs précis,
• Manque de lisibilité sur la composition des intrants (souche et aliment).

« L’intégration » apparaît en France, dans le domaine de l’élevage, au milieu des années 1950. Ainsi désigne-t-on les relations contractuelles qu’entretiennent certains éleveurs avec des entreprises situées en amont (alimentation, engrais, etc.) et/ou en aval (transformation, vente, etc.) de leur production. Ce sont les industriels de l’alimentation animale qui, alors, entraînent des éleveurs dans cette nouvelle forme d’agriculture : d’abord l’élevage de la volaille. Les intégrateurs fournissent l’alimentation des animaux, les reprennent lorsqu’ils sont « engraissés » et rémunèrent l’éleveur en fonction du poids acquis par les animaux et de l’alimentation consommée : « l’indice ». Cet indice met la pression aux éleveurs car c’est lui qui fait la rémunération.

Comme en milieu industriel, l’intégration est une voie de modernisation pour les petites entreprises. Pour les sous-traitants de l’industrie, la contribution des éleveurs intégrés limite les conséquences des évolutions techniques et des fluctuations de la production de ceux qui les dominent, au risque de leur propre précarisation. Ainsi, selon le cours de la volaille et les volumes mis en marché, les éleveurs intégrés servent de variable d’ajustement pour leurs intégrateurs, au détriment de leur rémunération. Ceux-ci modifient alors les délais de mise en pension et parfois les durées d’engraissement…

Par l’exemple de LDC Bourgogne, nous démontrons que la Région à travers sa marque « Ma région, ses terroirs » peut valoriser des entreprises qui vont à l’encontre d’autres politiques régionales, notamment sur le bien-être animal et sur le soutien au bien-vivre des agriculteurs et agricultrices de notre région.

Voici le témoignage d’un agriculteur, anciennement en intégration chez LDC :

Article écrit par Renaud DAUMAS, conseiller régional de la Haute-Loire.

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