Projet de mine de lithium dans l’Allier : Les exigences environnementales doivent être maximales

Imerys, multinationale de l’extraction minière, a annoncé ce lundi 24 octobre le lancement d’un important projet d’exploitation de lithium sur le site de la mine de kaolin exploitée depuis la fin 19e siècle, mine dite « de Beauvoir » en bordure de la forêt des Colettes (zone Natura 2000) sur la commune d’Echassières dans l’Allier. 

Les écologistes rappellent que le lithium est un métal indispensable à la production de batteries, essentielles pour le stockage d’énergies renouvelables et le développement des véhicules électriques. Le projet d’Imerys doit ainsi permettre à la France et à l’Union européenne d’accroître notre indépendance énergétique, et de réduire les coûts financiers et écologiques de transports de minerais. Cet objectif est louable. 

Cependant, un projet d’extraction minière n’est jamais anodin, et ne peut se prétendre 100% propre. Ce projet en France doit être l’occasion d’innover, pour faire de la mine de Beauvoir une référence mondiale, en atteignant des exigences écologiques maximales. Pour cela, notre groupe a établi une première liste de dix interrogations en suspens, que nous soumettons aux promoteurs du projet (cf. annexe).

Anne Babian-Lhermet, conseillère régionale de l’Allier, déclare : « Ce projet ne pourra être accepté socialement que s’il est réellement vertueux écologiquement, aussi bien pour le climat que pour la biodiversité. Son déploiement doit aussi se faire en toute transparence vis-à-vis des riverains. Nous serons particulièrement vigilants au respect des exigences environnementales, sociales et démocratiques qu’un tel projet implique. Nous souhaitons donc pouvoir échanger rapidement avec les porteurs du projet sur les dix points que nous avons listés. »

Enfin, notre groupe rappelle sa ferme opposition à un autre projet d’Imerys : l’extraction de terres de diatomée sur la narse de Nouvialle, zone humide du Cantal


Dix questions en suspens sur le projet d’extraction de lithium par Imerys sur le site de Beauvoir à Echassières dans l’Allier

  1. Dimensions du projet

Même si la mine existe déjà – ce qui limite d’emblée l’impact écologique et paysager du projet -, elle verrait son activité plus que doubler : aux 25 000 à 30 000 tonnes de kaolin extraits annuellement s’ajouteront donc 34 000 tonnes d’hydroxyde de lithium par an pendant 25 ans, et 3 millions de tonnes de roche, soit l’équivalent du poids de 300 Tours Eiffel par an [La concentration en lithium est de l’ordre de 0,9 à 1% à Beauvoir. Il faut donc environ 100 tonnes de roche pour extraire une tonne de lithium].

Il est donc indispensable que le promoteur du projet précise l’emprise du nouveau projet sur le territoire. Il apparaît évident que la mine devra être agrandie, reste à savoir dans quelles proportions, et avec quel impact ? 

  1. Impact sur l’eau et la biodiversité

S’agissant de l’eau, nous rappelons que cette mine se situe en bordure de la forêt des Colettes, site classé Natura 2000, dans le bassin versant de la Bouble et donc de la Sioule, affluent de l’Allier. Il est impératif que ce projet ne se fasse pas au détriment de la biodiversité locale, déjà fragile. 

Le promoteur devra également préciser les procédés d’extraction envisagés, les éventuels risques de pollution et la pression sur la ressource locale en eau qu’implique le projet, alors même que le bassin de la Sioule a été en proie à de fortes sécheresses ces dernières années. 

  1. Émissions de carbone

Si les batteries lithium-ion permettent de réduire  nos émissions de CO2, l’activité minière d’extraction d’hydroxyde de lithium reste fortement émettrice. Imerys avance le chiffre de 8 tonnes de CO2 émises par tonne de lithium extraite, soit deux fois moins que les exploitations de roche dure existante – ce qui reste déjà à prouver. Le projet devrait donc générer a minima l’émission de 272 000 tonnes de CO2 par an, soit l’équivalent des émissions annuelles de 60 000 Français. 

Il nous semble indispensable qu’Imerys travaille à réduire davantage l’impact carbone de son projet; et compense la part irréductible. 

  1. Gestion des déchets 

L’extraction d’autant de roche générera nécessairement des déchets. Nous souhaitons que le promoteur indique comment seront traités et stockés les déchets issus de l’extraction minière, et quels seront les risques de pollution de l’air et de l’eau. 

  1. Logistique et impact sur les riverains

Imerys indique vouloir inclure parmi ses initiatives de réduction des émissions de CO2 le transport par conduits souterrains et par train. Il est effectivement indispensable de limiter au maximum les nuisances pour les riverains comme pour la biodiversité, et d’aller vers une exploitation minière sans camions. D’après les riverains, c’est la gare de Bellenaves qui serait pressentie pour le fret, à 10 km de la carrière (via la D987). Mais qu’en est-il de l’aménagement de cette gare ? Et comment seront transférés les tonnes de minerais de la carrière vers la gare ? Un tunnel est évoqué à travers les schistes du massif des Collettes, sur 10km donc, ce qui générerait des tonnes de remblais. La logistique autour du projet doit impérativement être précisée.

  1. Qualité de l’emploi

Imerys annonce 1000 emplois directs ou indirects. Ces emplois doivent prioritairement bénéficier aux demandeurs et demandeuses d’emploi de l’Allier et du Puy-de-Dôme, avec un plan de formation ambitieux

  1. Structuration de la filière 

La filière des batteries lithium-ion se structure rapidement en France, avec le soutien de l’Etat et de l’Union européenne. Trois usines sont en développement, et cette mine viendra compléter en amont la filière. Nous restons cependant très vigilants sur l’aval, et la nécessité d’un recyclage de ces batteries. La ressource en lithium n’est pas inépuisable et nécessite des standards élevés d’économie circulaire. 

  1. Utilisation du lithium  

Imerys met particulièrement en avant le véhicule électrique dans sa communication, expliquant que la mine de Beauvoir permettra la production de batteries lithium-ion pour 700 000 voitures électriques. Nous rappelons que la production de lithium et d’énergie renouvelable doivent répondre à des besoins identifiés. Il ne s’agit pas de remplacer la voiture individuelle thermique par une voiture individuelle électrique, mais de réformer en profondeur nos mobilités.  

  1. Enjeu démocratique 

L’annonce d’Imerys intervient sans concertation préalable. Ce projet d’ampleur aux impacts forts nécessite la plus grande transparence et présente un enjeu démocratique. Nous appelons donc Imerys à rendre publiques dès aujourd’hui les études environnementales menées, et à financer une concertation préalable indépendante permettant à toutes les parties prenantes de s’informer et d’interroger le porteur de projet.

  1. Argent public 

Imerys annonce un projet d’investissement d’un milliard d’euros. Cet investissement sera-t-il entièrement autofinancé ? Le projet implique-t-il des adaptations sur les infrastructures routières et ferroviaires du territoire, et si oui à quel coût et avec quels financements ? Imerys présente un chiffre d’affaires de 4,4 milliards d’euros et une rentabilité financière de 7,7% en 2021. En vendant le kilo de lithium entre 7€ et 9€ [Estimation d’Imerys dans son communiqué], la mine de Beauvoir générerait un chiffre d’affaires de 6 à 7 milliards d’euros en 25 ans. 

2 réflexions sur “Projet de mine de lithium dans l’Allier : Les exigences environnementales doivent être maximales”

  1. Bravo pour le point 8 ! La voiture électrique n’est absolument pas une solution pour l’avenir. (Et risque de rendre nécessaire le recours au nucléaire, ce qui n’est évidemment pas souhaitable !)

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