Intervention de Catherine Bony sur les bourses de la réussite

Ce projet de bourses destinées aux lycéens et lycéennes nous a littéralement sidérés.

C’est dépenser beaucoup d’argent public pour arroser là où c’est déjà mouillé… car il ne faut pas se leurrer, ce ne sont pas les jeunes (et leurs familles) qui en ont réellement besoin qui bénéficieront de cet arrosage. Les critères d’obtention de cette bourse sont d’abord l’excellence chiffrée des résultats scolaires. L’INSEE note qu’ « À l’âge de 15 ans, la France compte parmi les pays européens où les inégalités sociales de résultats scolaires sont les plus fortes ». Celles et ceux qui auraient besoin de soutien financier seront à peine humectés… Je mesure bien que ce soit un bon coup de pouce, mais on en reste à l’exception qui confirme la règle ! 

Passons sur le critère « mérite personnel » dont la liste, non exhaustive, est donnée à titre indicatif… Avec quelle objectivité distinguer un élève qui a 17,5 sur 20, qui s’engage dans toutes les initiatives du lycée, d’un élève qui a 17,5 et fait preuve d’une implication sans faille envers ses camarades ?

Je suis sidérée devant cette mise en concurrence des jeunes puisqu’il s’agit ni plus ni moins d’en sélectionner un ou deux parmi des centaines dans chaque lycée. Cette philosophie de l’élitisme conduit à l’individualisme et à l’égoïsme, pas à la solidarité. Mon expérience d’enseignante me montre qu’ils réussissent bien mieux et plus nombreux quand ils coopèrent, pas quand ils sont en compétition permanente, y compris dans les concours de très haut niveau. 

Croire qu’arroser quelques-uns ruissèlerait sur la plus grande part est illusoire. Vous éclabousserez quelques-uns, alors que ces 750 000 € irrigueraient tant d’actions pédagogiques pour un nombre d’élèves sans commune mesure. Et notamment les projets pédagogiques culturels, de développement durable ou les séjours linguistiques à l’étranger que vous avez supprimés sans ménagement il y a un an. C’est pourtant ce genre d’action qu’on sait efficace pour propulser une scolarité, pour favoriser l’entraide et créer de vrais liens entre les personnes.

Vraiment, je n’aimerais pas être à la place des proviseurs au moment de choisir la candidature à présenter à votre jury, encore une fois fermé à l’opposition…

Nous nous opposons à votre vision fantasmée et élitiste de la réussite. Nous voterons donc contre ce rapport.

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