Fukushima, 13 ans après : que reste-il de nos bonnes résolutions ?

Le 11 mars 2011, un tsunami frappait la centrale de Fukushima Daiichi au Japon, entraînant une catastrophe nucléaire majeure et des rejets massifs dans l’environnement. Une catastrophe qui a contaminé de larges territoires et frappé durement des populations civiles. Treize ans déjà. 

Dans les mois qui ont suivi Fukushima, la majeure partie des Français a abandonné sa traditionnelle affection pour le nucléaire, affection longtemps confortée par l’immense machine de communication d’EDF avec son budget conséquent. 

Les années qui ont suivi Fukushima ont vu les rapports sur le risque nucléaire s’accumuler : l’IRSN a chiffré un accident nucléaire en France (430 milliards d’€), souligné que nos fleuves risquaient de ne plus pouvoir refroidir les centrales nucléaires avec le réchauffement climatique, qu’il fallait éviter d’y installer de nouveau réacteurs, … 

Des reportages ont montré la vie insupportable des enfants de Fukushima pour ne pas être trop exposés aux radiations. On a vu des familles non déplacées, malgré les taux de contamination importants de certaines zones. Il y avait ceux qui vivaient dans des algécos posés juste à la limite des zones interdites. On a vu les normes d’exposition aux radiations changer au Japon pour rendre certains territoires habitables. On a vu les no man’s land créés par l’accident, les exploitations agricoles abandonnées, les maisons laissées à contrecœur. 

En Ardèche, des associations ont accueilli des enfants venus de Fukushima pour leur permettre de prendre des vacances en plein air.

Des palanquées d’articles ont rappelé que l’état de nos centrales nucléaires était préoccupant… EDF a engagé des travaux «  post Fukushima » : des groupes électrogènes de secours, une force d’intervention « rapide » en cas d’accident dans une centrale, des digues relevées…  

À l’époque, il semblait logique d’envisager la fermeture progressive des centrales nucléaires. Celles qui allaient dépasser les 30 ans (la durée de fonctionnements pour lesquelles elles avaient été conçues) devaient être arrêtées en priorité. Il semblait urgent d’engager la transition énergétique. Pourtant une seule centrale, une des plus préoccupantes, a finalement fermé. Fessenheim en 2020 après 42 ans d’exploitation. 

Après Fukushima, le temps a passé. Cinq ans, puis dix ans, treize ans aujourd’hui, et on a oublié.

Nos centrales nucléaires ont tenu, des incidents réguliers, mais aucun accident majeur. Alors l’opinion publique s’est infléchie. EDF a recommencé à communiquer sur un nucléaire sans danger, choisissant même la stratégie osée de repeindre cette énergie en vert en raison d’un impact carbone relativement faible, qui oublie souvent les coûts carbone liés à la construction, à l’extraction et aux déchets

Et ce qui paraissait impossible après  Fukushima s’est produit ! Le nucléaire, que les places financières du monde entier disaient mort et enterré, est parvenu à se racheter une image.  Bien sûr, les groupes privés traînent toujours des pieds à investir dans ce placement peu sûr (Cf Flamanville et ses rallonges budgétaires insensées), mais l’État français, englué dans les dettes d’EDF et incapable de financer le démantèlement, a choisi de continuer sur sa lancée. 

Avec des investissements publics dans la transition énergétique insuffisants et des lobbyistes pronucléaires comme Jancovici, l’installation d’énergie renouvelable en France s’est trouvée limitée à peau de chagrin.

Treize ans de perdus encore, transition énergétique non engagée, retour au nucléaire ! 

Alors, on a oublié Fukushima… parce que faire fonctionner des centrales de plus de 35 ans, voir 40 ans, même si cela présente un danger, c’est rentable, surtout quand l’Etat paie les dettes ! 

On a attendu que l’opinion publique oublie la possibilité d’un accident pour annoncer la construction de nouveaux EPR… sur des fleuves. Ceux justement que les rapports disaient trop fragiles pour assurer les refroidissements. 

En ce treizième anniversaire de Fukushima, prenons un temps pour nous souvenir de Fukushima et ses victimes. Nous souvenir du déroulement de cette catastrophe nucléaire, entre déni des pouvoirs publics et des opérateurs, sidération et mensonges.  Nous souvenir collectivement de la manière dont cette centrale nucléaire a échappé à tout contrôle.

Outre une plongée dans les articles de presse de 2011 et les reportages plus récents qui nous disent comment les populations vivent toujours à Fukushima entre stigmatisation des déplacés et aspiration au retour vers des terres contaminées, je vous suggère la série The Days (Netflix), une série japonaise qui raconte heure par heure la catastrophe, les sacrifices, l’impréparation, la plongée dans l’inconnu, dans l’indicible d’un accident nucléaire. 

Le jeu des acteurs et le récit sont extrêmement sobres. La série parfaitement documentée. Le retour sur cet épisode tragique que nous avons tous vécu en direct à la télévision est une œuvre extrêmement utile. Une œuvre de fiction nécessaire pour mieux se souvenir de Fukushima où la catastrophe continue.

“The Days” : la série qui raconte la catastrophe de Fukushima de l’intérieur de la centrale nucléaire (francetvinfo.fr) 

Article écrit par Florence Cerbaï, conseillère régionale d’Ardèche

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