Intervention de Fabienne Grébert sur la pêche

Monsieur le Président,

Les pêcheurs ne devraient pas rester longtemps vos amis. Car ce que veulent les pêcheurs c’est qu’il y ait de l’eau dans les rivières et que les milieux aquatiques soient protégés. Une récente étude menée par l’agence de l’eau Rhône-Méditerranée-Corse, en partenariat DREAL Auvergne-Rhône-Alpes, annonce un débit estival moyen du Rhône en baisse de 20 % au cours des trente prochaines années, 40 % pour l’Isère, 30 % pour la Drôme ou la Durance. Cette situation est préoccupante pour un fleuve qui alimente en eau plus de 2,3 millions de personnes et 2 700 agriculteurs dépendant de l’ irrigation.

Pour la pêche, nous avons surtout besoin d’un plan pour la protection des milieux aquatiques ; c’est le sens de l’amendement que nous vous présenterons. Non pas qu’il ne faille pas le faire, puisque nous avons besoin des pêcheurs pour éviter la dégradation des milieux et détecter ces dégradations.  Mais si vous continuez à bitumer, bétonner, artificialiser, si vous continuez à financer des entreprises soupçonnées de polluer nos sols et nos rivières aux PFAS ou des exploitations agricoles qui carburent aux pesticides, les rivières disparaîtront, les poissons seront impropres à la consommation et vous mettrez les pêcheurs en colère, même si vous leur avez effectivement versé plus de 8 M€ depuis votre arrivée à la Région !

Les fédérations de pêche ont effectivement besoin de soutien financier public, pour réparer les dégâts liés à la crise climatique, aux sécheresses, à l’effondrement de la biodiversité, conséquences directes  des modes de production et des modes de consommation que vous soutenez avec ardeur.

Quelques exemples : 92% des ombles chevaliers du lac d’Annecy proviennent désormais de l’alevinage en pisciculture. L’eau du lac est trop chaude pour permettre la reproduction. 3000 poissons ont été sauvés près de Thônes l’été dernier grâce aux pêcheurs. Il n’y avait plus d’eau dans le Fier ; vous savez , la rivière que le préfet souhaitait priver des eaux captées par la retenue collinaire de Beauregard, plus utile aux canons à neige qu’à la restauration des milieux.  

La meilleure façon de protéger les milieux, c’est de respecter le grand cycle de l’eau. Laisser s’infiltrer l’eau dans les sols, végétaliser, débitumer et laisser l’eau recharger naturellement nos rivières. Protéger nos ressources en eau, c’est limiter l’usage des polluants qui infiltrent nos terres agricoles, remplacer les cultures trop gourmandes en eau, favoriser les pratiques agro-écologiques respectueuses de notre bien le plus précieux, toute chose que vous vous refusez à financer massivement.

Au fond, nous aimerions croire en votre amour de la préservation des milieux aquatiques et de la pêche. Après tout, vous savez vous montrer patient quand il s’agit de grosses prises. Nous aimerions que la contrepartie de ce soutien ne soit pas votre autopromotion, avec les petits panneaux bleus et votre photo dans les publications, et avec vos courriers d’autopromotion envoyés en grand nombre.Très sincèrement je préfèrerai qu’on rende hommage aux milliers de bénévoles qui participent à cette noble tâche. La valeur de nos cours d’eau, c’est à vous bénévoles que nous la devons et non à Laurent Wauquiez ! Ils sont nombreux vos soi-disant amis qui déchantent au moment de toucher les subventions promises. Ils sont aussi nombreux ceux qui en ont fait les frais : naturalistes, défenseurs des zones Natura 2000, accusés de collusions avec les écologistes. Les pêcheurs, défenseurs des milieux aquatiques seront-ils les prochains ? 

Enfin, ce dont les fédérations de pêche ont besoin, ce sont davantage de budgets de fonctionnement car, pour éviter les dégradations, il faut des garde-pêches formés, qui repèrent les braconniers, engagent des procédures, travaillent en coopération avec la police de l’environnement et suppléent les défaillances de l’Etat à faire respecter la loi. Pour sensibiliser les enfants à l’environnement, il faut également des animateurs formés, rompus à la pédagogie pour que cette nouvelle génération soit la nature qui se défende.

Mais de cela, vous n’en voulez pas ! Cette nouvelle génération pourrait bien vous donner du fil à retordre quand elle s’apercevra, une fois éveillée à la beauté de la faune et de la flore,  de votre incapacité à freiner l’assèchement de nos rivières et même de votre incapacité à garantir l’eau potable au robinet à tous les habitants de la Région.

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