Monsieur le président, cher.es collègues,
Dans cette période mouvementée, ce budget supplémentaire apporte des ajustements marginaux, dans la continuité de votre budget initial, comme si nous étions hors du monde, dans le monde merveilleux d’une Région gérée du mieux du monde.
Nous aurions pu voir des infléchissements, au vu des recettes finalement plus importantes que prévu, à hauteur de 25 millions supplémentaires, mais non, vous ne bougez pas. La réalité tient en 3 pages de commentaires avec quelques angles morts :
Silence radio d’abord sur les chapitres éducation et formation inchangés, alors que nous connaissons toujours les mêmes difficultés dans les lycées ou les universités.
Plus un mot sur votre campus du numérique, fleuron de votre politique formation, dont on a appris les difficultés qui se sont conclus par une trentaine d’emplois stoppés net en septembre et des jeunes sur le carreau.
Moins 6,5 millions sur l’aménagement du territoire, dans un contexte où, rappelons-le au passage, le SRADETT, ce schéma directeur structurant, n’a pas été révisé et que nous sommes des mauvaises élèves sur ce sujet-là. Dans notre région, plus qu’ailleurs en France, nous artificialisons l’équivalent d’un terrain de foot toutes les 2 heures et, sur cette politique, il serait temps d’avoir un cap clair.
Des provisions doublées “dans une démarche prudentielle” mais pour quels risques ? Nous n’avions pas de réponse jusqu’à hier, mais peut-être s’agit-il de ce que l’on doit désormais à la Ville de Givors, soit 2,4 millions + intérêts sur 2 ans, pour un engagement d’investissement non tenu, qui a été reconnu par le tribunal administratif.
130 M en apport dans la SPL AFAM pour l’achat de rames, « petit montage compliqué » comme vous le dites, et présentation “pas très pédagogique” comme le souligne pudiquement le CESER, pour enfin investir dans le ferroviaire. Mais vous omettez de dire que 60 millions de crédits d’investissement en transports, prévus cette année, ont été redéployés vers d’autres politiques, faute d’avoir été consommés !
Bref, c’est lisse, c’est propre, c’est net, quand dehors, en ce moment même le monde associatif, qui réalise ô combien de missions de service public, crie famine et dénonce les coupes budgétaires. En Auvergne-Rhône-Alpes, ce sont donc plus de 20 000 associations, qui emploie 241 000 salariés, dans des secteurs aussi variés que la culture, la formation, l’insertion, la santé, l’économie sociale et solidaire.
À côté de cela, vous prévoyez 12 M d’investissement pour une entreprise du CAC40 qui assurément redistribuera à ses actionnaires les subsides qu’elle aura tirés des collectivités. 450 M d’investissement pour viser 250 emplois créés à horizon 2036, on s’étouffe devant le coût de l’emploi à venir ! C’est même honteux de présenter toujours les choses de cette manière : comment justifier un tel ratio à 48 000 euros l’emploi créé, calcul sur la seule part Région…
Je vous propose de mettre en place le même indicateur à l’ensemble des associations à qui vous daignez encore verser des aides et pour lesquelles vous demandez en revanche des comptes et des résultats. En termes d’efficience, nous pensons qu’ils sont dans une performance inégalée par rapport à des grands groupes sous perfusion d’argent public !
Si soutenir les PME et TPE de notre territoire est important, il est à noter que, sur ce cas précis, ces 12 millions font partie des 270 milliards d’aides aux entreprises, sans contrôle ni contrepartie, qui creusent la dette de l’État. Nous pensons que Safran assurément n’a pas besoin de ces 12 millions supplémentaires pour la création de leur usine, quand leur dernière assemblée générale fait état d’une santé financière excellente et de fonds propres suffisants pour faire un tel investissement. Que cet investissement se conclut concrètement par un énième panneau bleu de marquage de territoire, aux côtés de celui de l’État, de l’Europe, … Vous venez donc ici en modeste renfort pour être sur la photo, encore une fois, ça fait cher l’opération de visibilité à coup de panneau bleu.
Par contre, et comme toujours, sur certains budgets de fonctionnement et en soutien à l’insertion par l’activité économique, par exemple, c’est la disette : depuis 2024, nous avons effet 59 nouveaux chantiers d’insertion qui viennent s’ajouter aux 172 déjà soutenus, mais à budget constant. Nous en sommes donc à mettre en place un fonds de compensation pour dédommager ceux qui ont de fait moins qu’avant, alors qu’ils assurent pourtant les mêmes missions. Autre exemple de réduction en fonctionnement qui fait mal avec le million d’économies réalisé sur les missions locales. Cela paraît si peu mais, en réalité sur ces deux sujets, c’est pourtant pour une utilité économique et sociale avérée et ancrée dans nos territoires.
Si, là encore, vous voulez vraiment soutenir les entreprises de notre territoire, encore faut-il que l’écosystème de la formation soit vivant et fortement soutenu : dans le développement des compétences, dans la formation des demandeurs d’emploi, dans le soutien aux actions d’insertion pour les publics les moins armés afin de les ramener vers l’emploi, ce que vous faites trop peu !
Alors, pour nous, comme le crient le monde associatif et les habitants de notre région qui pleurent leurs services publics, « ça ne tient plus ! », nous voterons contre ce budget supplémentaire qui joue la compression extrême des dépenses et qui exécute des orientations budgétaires que nous ne partageons toujours pas.